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mercredi 5 décembre 2012

Des dignités ecclésiastiques, et de la qualité de vidame, attachée à l'Église, selon G. A. de La Roque, 1678


Entre les titres de l'Église, celui de pontife et d'évêque est le plus grand. Aussi Saint Paul l'attribue à Notre-Seigneur : «  Jesus secundum ordinem Melchisedech Pontifex factus in Éternum [Jésus fut fait pontife pour toujours, selon l'ordre de Melchisédech] ( Ep. Ad Heb. [Épître aux Hébreux]). Le mot d'évêque signifie « intendant », ou « ayant l'œil sur quelque chose ».

Le prêtre s'interprète « vieillard », parce que l'on n’appelait à cette fonction que les anciens.

Le diacre est celui qui administrait aux veuves et aux orphelins ce qui leur était nécessaire, et il gardait les trésors de l'Église.

Il y avait anciennement des chorévêques qui avaient soin de veiller sur les paroisses de la campagne, auxquels ont succédé les archiprêtres et les doyens ruraux. Les archidiacres qui sont comme l'œil de l'évêque, ont aussi droit de juridiction. Leur soin s'étend sur les peuples et sur les curés dans l'étendue de leur territoire, où ils sont appelés in partem solicitudinis episcopalis [dans le cadre du souci épiscopal]. De tout cela, Monsieur le prieur a fait un ouvrage très docte [savant, informé, érudit] qu'il donnera au public.

Depuis le second âge de l'Église, on commença d'introduire le nom de père pour signifier ceux qui avaient les premières dignités.

Ainsi le mot d'abbé ne veut dire autre chose que « père », d'autant que les religieux, moines et solitaires sont enfants spirituels de l'abbé.

Tout de même, fut introduit dans le christianisme le mot de pape, qui n'a autre signification que « père ». Cependant les Souverains Pontifes de Rome, pour témoigner qu'ils n'affectaient point ces grands titres de Paternité, de Béatitude, et de Sainteté, mais qu'ils faisaient profession d'humilité chrétienne plus que personne, choisirent des termes éloignés de la grandeur, et se qualifièrent Serviteurs des serviteurs de Dieu. S. Grégoire Ier qui vivait l'an 590, fut le premier qui en usa, quoique d'autres disent que ce fut Saint Damase dés l'an 567.

Parce que Notre-Seigneur promit à S. Pierre de bâtir sur lui son Église, et que ce Prince des apôtres a présidé en deux sièges, Antioche, et ensuite à Rome; et qu'il envoya son disciple S. Marc présider en son nom à Alexandrie, ces trois sièges furent érigés en patriarcats. Pour celui de Jérusalem, ce fut en mémoire des miracles et de la passion de Notre-Seigneur. Celui de Constantinople a été érigé en considération de la demeure des empereurs, dont le grand Constantin fut le premier qui s'établit à Byzance.

Les archevêques ont été établis pour la distinction des provinces ; et les évêques qui leur sont fournis, s'appellent suffragants ; parce qu'aux assemblées où ils président, ils prennent leurs suffrages.

Les doyens, primiciers et prévôts, ont été érigés au-dessus des chanoines. Les archidiacres au dessus des diacres, et les archiprêtres au-dessus des prêtres.

Les curés s'appellent ainsi à cause du soin qu'ils prennent de leurs ouailles. En Bretagne, ils se nomment recteurs, comme régissant leur troupeau; et les réguliers qui gouvernent une paroisse, s'intitulent prieurs, aussi bien que ceux qui sont supérieurs d'un monastère.

Les cardinaux qui sont maintenant seuls capables d'être légats du S. Siège Apostolique, et d'élire le Pape, sont de très éclatantes dignités dans l'Église, et ont le titre d’Éminentissime.

Les chanoines sont les assistants des évêques. Ceux de Ravenne et de Compostelle sont appeliez cardinaux, au rapport de Duarin. Et l'abbé de la Trinité de Vendôme est aussi appelé cardinal. 

Vidame est une dignité féodale tenue de l'Église lorsque les évêques n'avaient soin que du spirituel, et ces vidames étaient défenseurs du temporel de l'Église. Ce sont seigneuries extraordinaires et hors le rang des autres, parce qu'elles relèvent de l'Église, et que leur tenure féodale est amortie. Ces vidames étaient les vicaires des évêques en la temporalité de leurs évêchés ; mais ils étaient seigneurs de la terre, et exerçaient la justice temporelle à la place de l'évêque.Du nombre de ces vidames étaient ceux de Reims, de Châlons, de Gerberoy, du Mans, de Chartres, d'Amiens, de Laonnois, ou de Laon, d'Esneval. On y ajoute Meaux et Tulles. Ceux qui avaient soin du temporel de quelques abbayes, comme d'Arras, de Saint-Omer, et autres en grand nombre, étaient appelés avoués ou advocati. Il en est parlé dans le livre second des Lois faites par Louis le Débonnaire, chapitre 18, et dans le concile de Mayence de l'an 813, art. 10 : « Omnibus episcopis abbatibus cunctoque clero omnino præcipimus vicedominos, prepositos, advocatos sive deffensores bonos habere. [Nous recommandons aux évêques, aux abbés, et à tout le clergé en général d'avoir de bons vidames, de bons prévôts et de bons avoués ou défenseurs] »

Flodoard, au second livre de son Histoire [de l'Église de Reims] décrivant le devoir des évêques, des abbés, et des abbesses, se sert de ces termes, au sujet de ces vidames et avoués : « Ut bonos et idoneos vicedominos et advocatos haberent, et undecumque fuisset justitias perficerent. [Afin qu'ils aient de bons et convenables vidames et avoués, et que, où que ce soit, ils rendent parfaitement la justice] » Ainsi comme nos rois firent leurs comtes juges de leurs vassaux, les comtes firent le semblable, en créant des vicomtes, et les ecclésiastiques firent des vidames et des avoués.

Ces avoués sont qualifiés œconomi Ecclesiæ [économes de l'Église], advocati [avoués], patroni [patrons] et custodes [gardiens], dans le canon Volumus, et dans le canon Diaconum, distinction 89, chapitre Consulere de Simonia. 

Pasquier donne rang aux vidames après les comtes, et dit qu'ils doivent précéder les vicomtes, parce qu'ils représentent les évêques.

Je dirai à ce sujet qu'il y a des personnes si grossières d'alléguer que les vidames accouchaient les reines et les princesses souveraines, et quasi obstetrices dicebant eos esse [ et ils disaient qu'ils étaient pour ainsi dire des accoucheurs].

Il est à remarquer que lorsque le diacre commençait la lecture de l'Évangile, les seigneurs feudataires de chaque évêché, tiraient l'épée du fourreau pour témoigner le zèle qu'ils avaient pour la défense des vérités de l'Église, ce qui s'érigea en office dépendant des Églises, dans plusieurs diocèses. Cette cérémonie fut instituée au Xe siècle par Wenceslas, premier roi de Pologne chrétien, selon Monsieur le Cardinal Bona, en son ouvrage Rerum Liturgicarum (I. Bona, S. R. E. [Sanctæ Romanæ Ecclesiæ] Cardinalis [Cardinal de la Sainte Église Romaine], livre 2, chapitre 7.)

Finalement le titre de patron d'église procède de la fondation. Il y a trois sortes de patronages. Le premier est de celui qui donne le fonds ; le second de celui qui fait le bâtiment ; et le troisième de celui qui fait la dot. Mais nul n'est absolument patron, s'il n'a droit de présenter au bénéfice : car il y a souvent de l'abus aux patronages qu'on appelle honoraires.

Pour ceux qui ont le titre de trésorier, de marguillier, de gager, ou de fabricier, c'est pour administrer le revenu d'une église érigée en paroisse, avoir soin du temporel et des meubles du revestiaire ou sacristie : à quoi ils commettent du consentement du curé, tantôt un clerc, tantôt un laïque, selon les occurrences, ou ils partagent l'office en deux.

Référence

Gilles André de La Roque, Traité de la Noblesse, Étienne Michallet, Paris, 1678, p. 306 et suiv. L'orthographe et la ponctuation ont été modernisées par l'auteur de ce blog.

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