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mercredi 13 juillet 2011

Pleurer par manque d'exercice, un instinct du nourrisson, selon Samuel Smiles, 1838.



Voici présentés ici deux textes (1838) de Samuel Smiles (1812-1904), un auteur et réformateur politique écossais, dont l'ouvrage le plus fameux est Self-Help (que l'on pourrait traduire par Aide-toi toi même), publié en 1859. 

Ces textes sont un exemple de la façon dont on pouvait concevoir les perceptions des nourrissons dans la première partie du XIXe siècle, et les conséquences malheureuses que l'on en tirait, parfois, quand il s'agissait d’interpréter leurs pleurs ; notamment l' idée que ces pleurs sont bons pour les poumons et bons pour le bébé, dès lors qu''ils ne sont reliés ni à la faim, ni à l'inconfort, ni à tous autres besoins que l'auteur exposent également plus loin. 

Certains jeunes parents reconnaîtront ainsi les conseils encore prodigués, parfois, en ce début du XXIe siècle, par certains membres de leur entourage.


Les facultés mentales, comme les sens, sont parfaitement absentes chez le nourrisson nouveau-né, et sont encore plus longues à faire leur apparition. Leur organe propre, le cerveau, est alors moins parfaitement organisé, comparé au plein développement de [celui de] l’homme, que toute autre partie de l’organisme. Il est extrêmement mou — sa consistance est presque liquide, — et tout à fait incapable de mettre en œuvre ces fonctions intellectuelles élevées si caractéristiques de la supériorité de l’homme. C’est seulement après que les sens ont été cultivés dans cette mesure que l’on peut dire que l’esprit existe en tout temps, étant donné que c’est par cette voie d’accès [les sens] que ses toutes premières idées sont acquises. Ils sont [les sens] comme les fenêtres à travers lesquelles la lumière est versée au-dedans et qui illuminent ce qui était auparavant sombre et indistinct. Toutes ces sortes de perceptions [feelings] pures et raffinées, dont les parents aimants ont alors paré leur tendre et innocente progéniture, n’ont, en réalité, aucune réalité. Le nourrisson sur les genoux de sa mère n’a aucune perception [feeling], si ce n’est celles qui sont instinctives. Le sourire qui joue sur ses lèvres n’est pas le résultat d’un processus mental quelconque, mais plutôt celui d’un instinct animal satisfait ; ses pleurs ne trahissent pas non plus une perception [feeling] mentale dont il serait conscient. Mais en grandissant, les sens commencent à fonctionner ; et le cerveau devient capable de percevoir, à travers eux, les impressions.

(...) 

Lorsqu’un enfant est freiné dans ses actions musculaires, ou est incapable de les engager, il est obligé, par un instinct tout aussi puissant, de crier. Cela peut paraître à beaucoup hérétique lorsque nous affirmons, comme nous le faisons en toute confiance, que le nourrisson crie bien plus rarement de douleur que par instinct lorsque ses poumons se remplissent et que leur mouvement devient trop faible ; et cela, le fait que les enfants crient parce qu’ils désirent de l’exercice musculaire, au lieu d’être redouté, est bénéfique au plus haut point, [considéré] dans ses effets. Si nous observons les occasions dans lesquelles un enfant pleure, et que nous réfléchissons sur les effets physiques que cela produit sur son organisme, nous devrions indubitablement en arriver à cette conclusion. Les enfants maladifs et affaiblis pleurent beaucoup, et sans cela, il est presque certain qu’ils ne pourraient pas vivre longtemps. Cela constitue leur seul exercice, [et] souvent, en fait, leur seule nourriture, car, lorsqu’ils cessent de pleurer, bientôt ils agonisent et expirent. La première chose que fait le nourrisson à la naissance, c’est de pleurer ; et beaucoup d’entre eux continuent de le faire en moyenne quatre ou cinq heures par jour pendant les premières années de leur existence. On ne peut pas même imaginer un instant que tous leurs pleurs proviennent d’une sensation de douleur. Cela serait anormal du point de vue de l’œuvre bienveillante de la création, et [ce serait] infliger une douleur imméritée à de petits innocents, si cela était le cas. Pas du tout. Ils pleurent à défaut d’exercice, ou plutôt pour faire de l’exercice ; et nous devrions immédiatement expliquer d’une manière assez satisfaisante, le bénéfice qu’ils en tirent. Les médecins savent généralement anticiper au mieux le terme favorable du cas où l’enfant pleure longuement, souvent et énergiquement ; et les nourrices devraient ne pas penser moins positivement d’un enfant qui pleure bruyamment (1).

S’efforcer de réprimer un instinct (car c’en est un) est inutile et déplacé : les faire dormir, comme beaucoup font avec des spiritueux, du pavot, et d’autres narcotiques, est pernicieux au plus haut point pour la santé ; et pour des raisons que nous avons déjà données, cela les rend plus sujets aux maladies dangereuses.


Note.

(1) « Vous ne devez pas, » dit Mme Bakewell, « être peinée par tous les petits pleurs de votre bébé ; car les pleurs constituent souvent un effet de la nature qui exerce leurs poumons, qui requiert certainement de l’exercice aussi bien que tous les autres organes du corps ; c’est aussi, très fréquemment, le meilleur remède que l’on peut trouver pour les troubles qui les causent. Par exemple, si un nourrisson est gêné par des flatulences, le fait de pleurer les dissipera et le soulagera ; s’il a froid, les pleurs provoqueront un afflux de sang à la surface de la peau qui y rétablira une action saine et chaude. » Mother’s Practical Guide. (Le guide pratique de la mère).

Source.

Samuel Smiles, Physical Education ; or, The Nurture and Management of Children, Founded on the Study of their Nature and Constitution , Oliver and Boyd, Édimbourg, 1838, p. 23-24 (texte 1) et p. 94-96 (texte 2).

La traduction, bien imparfaite, du texte anglais original est le fait de l'auteur de ce blog. 

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