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mercredi 29 juin 2011

La sodomie dans l'ancien droit français, 1757.

[Orthographe modernisée.]


De la Sodomie.


Ce crime qui tire son nom de cette Ville abominable, dont il est fait mention dans l'Histoire Sacrée se commet par un Homme avec un Homme, ou par une Femme avec une Femme.

Il se commet aussi par un Homme avec une Femme, lorsqu'ils ne se servent pas de la voie ordinaire pour la génération (1). 

Enfin il se commet par un Homme sur soi-même ce que les Canonistes appellent mollities, et les Latins mastupratio.

La peine d'un si grand Crime ne peut être moindre que celle de Mort. La vengeance terrible que la Justice Divine a tirée de ces Villes impies ou ce Crime était familier fait assez voir qu'on ne peut le punir par des Supplices trop rigoureux et surtout lorsqu'il est commis entre deux personnes du même Sexe ; cette peine est portée expressément par le Chapitre XX. du Lévitique, en ces termes : Qui dormierit cum masculo coitu foemineo, uterque operatus est nefas, morte moriatur, sit sanguis eorum super eos ; la même peine est prononcée par l'Authentique, ut non luxurietur, contre ceux qui tombent dans ce Crime détectable.

La Loi cùm vir. au Code de Adult.veut que ceux qui tombent dans ce Crime soient punis par le Feu vif. Cette peine qui a été adoptée par notre Jurisprudence s'applique également aux Femmes comme aux Hommes, aux Mineurs comme aux Majeurs : il y a cependant des Auteurs tel que Menoch (2), qui prétend qu'à l'égard des Mineurs il y a lieu d'ordonner un Supplice de Mort moins rigoureux que celui du Feu et même qu'on peut le convertir en peines afflictives, lorsque le Mineur est dans un âge tendre, et au-dessous de quatorze ans.

Mais si ce Crime mérite une punition si révère lorsqu'il est commis par des Laïcs, à plus forte raison lorsqu'il est commis par des Ecclésiastiques et des Religieux, qui doivent l'exemple de la Chasteté, dont ils ont fait un vœu particulier ; aussi voit-on des Arrêts qui, en même temps qu'ils ont déchargé de l'Accusation des Curés qu'on poursuivait pour ce Crime, es ont exclus néanmoins, sur de simples soupçons, de toutes fonctions ou emplois tendant à l'éducation de la Jeunesse: Duperray en rapporte un de cette espèce du 10 Décembre 1687 (3).

Au reste, quelque rigoureuses que soient les défenses et les peines qu'on a attachées à ce Crime, contre lequel on a vu s'armer également la Justice du Ciel et de la Terre, il faut convenir, à la honte de notre siècle qu'il n'a pas laissé que de se perpétuer jusqu'à nos jours ; nous en avons vu des exemples récents dans la personne des nommés Bruneau le Noir et Jean Diot qui, par Arrêt du 5 Juin 1750, ont été Brûlés en Place de Grève : il est vrai que si les exemples de leur punition ne sont pas aussi fréquents que l'est ce Crime, on peut dire que c'est moins par l'effet de la négligence des Juges, que par l'effet des précautions secrètes qu'ont coutume de prendre ceux qui y tombent, pour en dérober la connaissance au Public.

Par rapport à la dernière espèce de ce Crime qui se commet sur soi-même, la peine de ceux qui y tombent, lorsqu'ils sont découverts (ce qui est extrêmement rare ) est celle des Galères ou du Bannissement, suivant les circonstances de scandale qu'ils ont causé. La même peine doit aussi être portée contre ceux qui apprennent à la Jeunesse à se polluer ; et de plus, l'exposition au Carcan avec un Écriteau portant ces mots : Corrupteur de la Jeunesse.


Notes. 

1. Voir les Nov. 77 et 141. de his qua luxur. contra nat.
2. V. Menoch, de Arbit. cas.329. n. 5.
3. V. Duperr. des moy. Can. ch. 8. p. 6.


Me Pierre-François Muyart de Vouglans, Institutes au droit criminel, ou Principes généraux en ces matières, suivant le droit civil, canonique, et la Jurisprudence du Royaume, avec un traité particulier des crimes, impr. de Le Breton, Paris, 1757, p. 509-510.

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